Lincoln, cette marque qui ne me fait plus rêver

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Lincoln, cette marque qui ne me fait plus rêver

Lincoln. Cette marque qui évoque luxe et limousines présidentielles – on a tous en mémoire l’assassinat de Kennedy à l’arrière d’une Continental ’61 – sombre peu à peu dans la banalité, à l’image de la fin de carrière d’une Mercury ou d’une Pontiac.

En suivant l’actualité, j’apprends que la branche haut de gamme du groupe Ford vient de lancer un nouveau concept de magasin au marketing bien rodé. Le principe du Lincoln Experience Center inauguré à Newport Beach en Californie ? Accueillir le grand public dans un bâtiment design, chic à l’ambiance feutrée et chaleureuse à la fois pour prendre un thé, un café, se relaxer dans un espace détente ou profiter de l’acoustique exceptionnelle d’une installation Harmann-Kardon. Des animations régulières et variées (concerts de musique, expositions d’art et de joaillerie, dégustation de vins et fromages…) auront pour mission de surprendre toujours plus le visiteur et l’inciter à revenir. Et comme on est aussi – et surtout – là pour vendre des voitures, des modèles sont exposés en permanence et des hôtes à votre disposition pour toute information ou remplir directement un bon de commande. Des tablettes numériques permettent de créer la Lincoln de ses rêves. C’est un peu comme un club Nespresso à la gloire de Lincoln et sans George Clooney.

Un concept store dans l’ère du temps…

Certains crieront à l’hypocrisie du concept – vendre une pseudo-expérience pour que le client soit tenté par un achat – mais quand on aime l’automobile et qu’on la considère au delà d’un simple objet, l’histoire qu’on nous raconte autour d’un modèle ou d’une marque fait fantasmer et laisse imaginer qu’on achète plus qu’une voiture. Vus le positionnement luxueux de Lincoln et son riche passé, tous les éléments sont réunis pour nous conter une belle histoire, sans besoin d’en inventer trop.

Personnellement, j’adore ce principe. J’estime que le client qui met un tel prix dans une bagnole appréciera de payer pour une expérience plus qu’une simple voiture. On n’achète pas une Lincoln comme on achète une Ford. La concurrence est rude et on peut plus se contenter de vendre une auto de luxe uniquement grâce à ses qualités intrinsèques. Le client doit se sentir privilégié et cet Experience Center fait un vrai pas dans ce sens. Cependant, la meilleure stratégie marketing du monde ne fera pas des miracles si le produit final n’est pas un minimum à la hauteur.

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Le lieu vend du rêve. Le produit, beaucoup moins.

… Mais des modèles pas franchement excitants

A l’image du « single frame » d’Audi, Lincoln a trouvé sa signature visuelle; une calandre segmentée en deux évoquant des ailes d’oiseau déployées (et certainement l’esprit de liberté qui va avec… blablabla). C’est une question de goût mais je trouve le résultat d’une grande fadeur, surtout si on le compare avec l’éternel concurrent Cadillac qui a pris un virage stylistique bien plus réussi depuis quelques années. Seules les berlines MKZ et l’illustre Continental sortent un peu du lot mais à quel prix. A mi-chemin entre une Jaguar XJ et une Chrysler 300, elles manquent d’identité et ne font franchement pas rêver plus que ça. On attend mieux d’une marque aussi iconique. Même le Lincoln Navigator – variante luxueuse du Ford Expedition – est moins convaincant que son « parent pauvre ».

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La gamme Lincoln 2016.

Nostalgique des bonnes vieilles Mark III, IV, Town Car de la fin des années 1960, du début des années 1970, j’aurais rêvé de modèles qui leur rendraient vraiment hommage. Bien entendu, il faut être réaliste: impossible de proposer de tels paquebots dans notre époque. Les américains ont eu leur lot de démesure et veulent des joujoux à la fois beaux – mais pas trop clinquants – et efficaces mais pas trop gourmands. Lincoln comme Cadillac en a beaucoup souffert dès les années 1980. Remettons les choses dans leur contexte. Toutefois, pour moi, Lincoln est sans doute la marque de luxe qui a le plus perdu de son attrait et de son ADN amerloque dans le progrès. Chrysler a fait un retour fracassant avec la 300C; Cadillac avec la CTS au cours des années 2000. Lincoln est resté sur le carreau avec sa Town Car; une Crown Victoria travestie en voiture de luxe… Jusqu’en 2011. Modèle que j’adore mais qui n’aura pas aidé la marque à redorer son blason. Et autour de ça, pas grand chose à se mettre sous la dent. On sentait déjà le déclin.

Une croissance timide mais une croissance quand même

Après la suppression de la marque Mercury en 2011, la FoMoCo a décidé de mettre le paquet sur Ford et Lincoln, en prenant soin de développer une identité forte et unique pour chacune. Le 3 décembre 2012, la division Lincoln devient The Lincoln Motor Company, une marque à part entière avec ses équipes dédiées. De nouveaux modèles doivent être proposés dans l’esprit de la MKZ lancée début 2013. Les ambitions vont au delà du continent américain puisqu’il est question de lancer l’essentiel de la gamme en Chine et d’y ouvrir une soixantaine de concessions d’ici fin 2016. Lincoln y joue la carte du luxe et de la personnalisation en proposant des véhicules quasi sur-mesure, histoire de titiller l’ami Buick déjà bien implanté.

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La Lincoln MKZ aura permis à la marque de renouer avec le succès.

Malgré mon manque d’intérêt pour cette nouvelle ligne de modèles Lincoln, la croissance est enfin là. La MKZ rencontre un certain succès permettant à la marque d’augmenter ses ventes de 16% pour 2014 et 7% l’année suivante. Même si elle n’atteint pas des sommets, la tendance est plutôt encourageante pour la suite. Preuve en est que la marque n’a pas fait que les mauvais choix… En ne prenant pas trop de risques.

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Un concept de Continental très inspiré des sixties qui me laissait bien plus rêveur.

L’annonce d’une nouvelle Continental m’enthousiasmait beaucoup. Ce renouvellement d’un modèle culte était l’occasion de dévoiler un peu le futur de Lincoln et un avenir plus radieux. Bof. Rien qu’on ait pas déjà vu. Une ligne très semblable à d’autres berlines concurrentes, des intérieurs pas très joyeux. Pas une once de clin d’œil à la folie des seventies. Bienvenue dans l’ère de la globalisation où la « Deutsch Qualität » passe avant l’originalité. Il est très très très loin le temps des toits vinyles et des Continental kits.

2 Commentaires

  • mccloud
    27 août 2016

    Vrai. Nostalgique comme vous des MKIII,IV,V, Town Car et Continental, de série et déclinées en limos, pimpmobiles, etc… (je continue à soutenir que la Lincoln Continental Mk IV est la plus belle voiture de tous les temps -la seconde à mon hit-parade personnel étant la Rolls Corniche), auprès de mon entourage qui se demande ce que je peux trouver d’extraordinaire à un tel « char d’assaut »). La nouvelle Continental emprunte certes à Bentley, Jaguar, Audi. C’est la globalisation. Des types comme Barris, Exner, Raymond Loewy, Harley J. Earl n’ont plus leur place dans cette litanie asiatiforme, d’abord fonctionnelle et soumise au principe de précaution. A titre d’exemple, une berline Tesla stationnée dans ma petite ville rurale, a été prise par les badauds pour « la nouvelle Citroën », ou pour la Maserati Quattroporte que pilote Omar Sy dans Intouchables.
    Pas trop d’accord avec vous concernant la CTS de Cadillac. Le seul modèle qui m’a accroché depuis le crépuscule de la broughamisation, est le cabriolet Ciel, que je voyais comme le digne successeur de l’Eldo (la VRAIE Eldo, produite jusqu’en 1976), resté à l’état de concept-car.

  • RIVA
    20 septembre 2017

    J’ai une Continental Mark IV de 1975 luxury group « aqua blue »… Et c’est vrai que c’est quand même plus fun, plus « disco » que la production actuelle…. ! Un autre espace temps ! 😉

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